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Les éleveurs Mbororo au cœur des tensions intercommunautaires à Dungu

3 avril 2025 par
Les éleveurs Mbororo  au cœur des tensions intercommunautaires à Dungu
Daniel BAZANGA
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Dans le territoire de Dungu, en province de Haut-Uélé au nord-est de la République Démocratique du Congo, les éleveurs Mbororo se trouvent au centre d'une dynamique complexe de tensions intercommunautaires. Ces éleveurs, souvent nomades, sont connus pour leur élevage de bovins et leur mode de vie pastoral. Cependant, leur présence dans cette région a suscité des conflits avec d'autres communautés, notamment les agriculteurs sédentaires, qui voient leurs terres et leurs ressources menacées par le passage des troupeaux.

Les Mbororo, originaires du Nigeria et d'autres pays de la région, ont migré vers Dungu à la recherche de pâturages pour leurs animaux. Cette migration, bien que motivée par des besoins économiques, a engendré des frictions avec les populations locales. Les agriculteurs, qui dépendent de la terre pour leur subsistance, se plaignent souvent des dommages causés par le bétail sur leurs cultures. Ces conflits d'intérêts ont conduit à des tensions croissantes, exacerbées par des facteurs tels que la rareté des ressources en eau et la dégradation des terres.

Les tensions intercommunautaires à Dungu ne sont pas seulement le résultat de la compétition pour les ressources, mais aussi de facteurs historiques et culturels. Les Mbororo, en tant que groupe ethnique distinct, sont souvent perçus comme des outsiders par les communautés locales. Cette perception peut alimenter des stéréotypes négatifs et des préjugés, rendant la coexistence pacifique plus difficile. De plus, les rivalités historiques entre les différentes communautés de la région compliquent encore davantage la situation.

Les conflits entre éleveurs et agriculteurs ne sont pas nouveaux, mais ils se sont intensifiés ces dernières années en raison de la pression croissante sur les ressources naturelles. La déforestation, l'urbanisation et les changements climatiques ont réduit les terres disponibles pour le pâturage et l'agriculture, exacerbant ainsi les tensions. Les éleveurs Mbororo, en quête de nouveaux pâturages, se déplacent souvent vers des zones déjà occupées par des agriculteurs, ce qui entraîne des affrontements.

Pour tenter de résoudre ces tensions, plusieurs initiatives ont été mises en place. Des organisations non gouvernementales et des acteurs locaux travaillent à promouvoir le dialogue entre les différentes communautés. Ces efforts visent à sensibiliser les populations aux enjeux de la coexistence pacifique et à encourager des pratiques de gestion des ressources partagées. Par exemple, des programmes de formation sur l'élevage durable et l'agriculture intégrée ont été introduits pour aider les Mbororo et les agriculteurs à trouver des solutions mutuellement bénéfiques.

Cependant, ces initiatives rencontrent des obstacles. La méfiance persistante entre les communautés, alimentée par des incidents violents passés, rend difficile l'établissement d'un dialogue constructif. Les rumeurs et la désinformation circulent rapidement, exacerbant les tensions et créant un climat de suspicion. De plus, l'absence d'une gouvernance efficace et d'un cadre juridique clair pour la gestion des ressources naturelles complique encore la situation. Les autorités locales doivent jouer un rôle clé dans la médiation des conflits et la mise en place de politiques inclusives qui tiennent compte des besoins de toutes les parties prenantes.

Dans ce contexte, il est également crucial que l'État congolais envisage de faire retourner les éleveurs Mbororo dans leurs pays respectifs. Cette mesure pourrait contribuer à éviter une situation similaire à celle des Rwandais en RDC, où des tensions ethniques ont conduit à des conflits dévastateurs. En facilitant le retour des Mbororo, l'État pourrait réduire les frictions intercommunautaires et favoriser un environnement plus stable pour les agriculteurs locaux.

Il est également essentiel d'impliquer les jeunes dans ces initiatives de paix. Les jeunes, souvent en quête d'opportunités économiques, peuvent être facilement influencés par des discours de haine ou de division. En les engageant dans des projets communautaires, on peut les sensibiliser à l'importance de la coexistence pacifique et leur donner les outils nécessaires pour devenir des agents de changement au sein de leurs communautés.

La situation des éleveurs Mbororo à Dungu illustre donc les défis complexes liés aux tensions intercommunautaires dans un contexte de compétition pour les ressources. Pour parvenir à une coexistence pacifique, il est essentiel de favoriser le dialogue, de promouvoir des pratiques durables et de renforcer la gouvernance locale. Seule une approche collaborative et inclusive pourra permettre de surmonter les obstacles et de construire un avenir harmonieux pour toutes les communautés de la région. La paix durable ne peut être atteinte que par la compréhension mutuelle et le respect des droits et des besoins de chacun.



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